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Feuille Chute Abscission


Dominique.

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La chute des feuilles

 

L’automne   est cette période où les forets prennent des couleurs  souvent somptueuses  .Le manque de lumière  va aboutir à la dégradation de la  chlorophylle  pour  laisser apparaître les pigments sous-jacents :   les  carotènes  oranges  - les anthocyanes pourpres - les xanthophylle  jaunes .  Toutes  ces couleurs  annoncent la   senescence  prochaine des  feuilles  et leur chute..

 

La chute des  feuilles    en masse  est la caractéristique  des plantes  décidues qui   perdent leurs  feuilles avec l’ arrivée de la mauvaise  saison  .Pour les plantes sempervirentes   ( type  pin  - sapin  -chêne vert  ) les feuilles ont des durées de vie de 2 à 5 ans .

Il y a   2 types de plantes  décidues.  

  • Les plantes  à feuilles caduques    où la chute est synchrone
  • Les plantes marcescentes où la chute est asynchrone  et où la chute sera très étalée  en fonction   du vent.

 

La présentation  va se faire en  deux parties :

  • Examen morphologique de  la chute des  feuilles de 5 végétaux.
  • Exposé de l’interprétation actuellement  en vigueur de ce phénomène.

Examen morphologique :

Le bouleau :

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Les feuilles du bouleau  jaunissent    et ne font que commencer à  tomber (on est fin octobre) .

Panorama de  9 images.

Coloration  Aslim III . de Klaus .

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  1. -- Bois de la branche.
  2. -- Début du bourgeon  qui finit sa formation  et  se met  en attente  du prochain printemps.
  3.  -Pétiole : zone de rupture de l’axe vasculaire  du pétiole  dans  son raccordement avec  celui de la  branche.
  4. --Zone d’abscission   au  premier stade  qui  est celui de la destruction cellulaire selon un plan   qui sectionne la  base du pétiole.

La zone d’ abscision :

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A –Zone de dépôt de subérine  qui  va protéger les cellules de la  branche après le départ de la feuille.

B – Apparition sur le bord  de la  zone d’abscission  de  petites cellules  allongées  - et aplaties non encore lignifiées .

C – Zone   de  destruction cellulaire : les cellules  sont vides, leur paroi commence à se lyser.

 

Le hêtre

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La photo   du haut :

  Le stade initial  avec le développement  d’une zone où  les cellules  sont modifiées  1  - les vaisseaux commencent à se boucher . 2 –

  • La prise de colorant  différente  entre la base du pétiole et la partie  au-dessus  met en évidence  une modification  des caractéristiques  chimiques  des constituants

Photo du bas :

Le stade final le pétiole  est quasi  détaché    - A ce moment-là le bouchon de subérine  (A)  est bien développé  et ici  bien  évident.

 

 

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Photo du haut : Détails  sur le processus  de  la désorganisation  du système vasculaire :

L’architecture est perturbée  et la continuité des vaisseaux  est altérée.

Photo du bas :

En 1  on retrouve  cette bande cellulaire  caractéristique.

En 2 l’extrémité des vaisseaux  développe des bouchons. :Les thylles  qui  sont  des intrusions dans la lamelle  moyenne de la paroi des vaisseaux   et qui  vont fermer les ponctuations des vaisseaux   ,les rendant  non fonctionnels .     Dans  un second temps cette zone va se subériser .

 

Le poirier

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Ces deux photos mettent  aussi en évidence la dégradation  du système  vasculaire.

La photo du haut   a été  réalisée  sur une  feuille  verte  mais  en début d’ octobre   .A cette période  rien n’ est visible  mais  la  désorganisation du système vasculaire   est en cours

La photo en dessous  a  été réalisée   3 semaines plus tard – la feuille  est jaune  le système  vasculaire  est détruit  ( A ) .Le trait  d’ abscission   commence  à être  visible .

 

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La photo du haut met en évidence  que le maintien de la feuille , après  la destruction  cellulaire  ,est obtenu    par les vaisseaux  ( xylème  et phloème )  seulement .

Une agitation des feuilles par le vent n’aura aucun  mal  à les faire tomber.

Sur la photo du bas  on constate  que la  feuille   se détache  alors que la zone cicatricielle   de la  tige  est totalement  subérisée : sa protection est donc  efficace.

 

 

Le tilleul

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Chez le tilleul  on constate que, là  encore, l’obstruction des  vaisseaux   est un point important   du processus. Ici  l’ obstruction  se fait   dans la tige elle –même  la flèche indique l’ endroit ( la photo n’est pas  terrible  mais la préparation de la tige de tilleul  a rencontré  un phénomène  étrange  -  une substance gluante   s’ est  formée  en abondance  malgré   un essai d’ ablation il en est resté ce qui donne  ces formations  vertes  filamenteuses ) .

 

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Le tilleul  réalise l’ abscission du pétiole  alors que la zone cicatricielle  du côté de la tige n’est pas  totalement  ébauchée  - la zone de la cicatrice est  donc  une zone de fragilité  durant cette période ( A )  - Sur la photo les  vaisseaux  ont  commencé la suberisation des thilles .

 

Ces 4 exemples  développent  le même processus    - l’ abscission   du pétiole sur la tige  mais d’ autres plantes  vont réaliser  cette abscission   soit  entre le pétiole  et la tige   soit entre la  feuille et le pétiole .

 2 exemples  le marronnier  et la vigne :

 

Le marronnier

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L’histologie du pétiole de marronnier  à la fixation sur la  tige   est identique à ce  que  nous avons déjà vu  

  • A désorganisation  des  vaisseaux.
  • B développement  d’une plage de petites cellules allongées.
  • C début d’ abscission   au centre du pétiole .

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L’ abscission  à l’union du limbe de la  feuille  et de son pétiole   n’ est différente que par l’ absence de suber  de la zone cicatricielle  - cette élaboration  n’ est  ,en effet , pas utile  puisque le pétiole sera éliminé  quelques  jours plus   tard grâce à l’abscission  distale .

 

La vigne

 

 2 zones d’ abscission  possibles :

--- Soit à l’ union  pétiole  - limbe de la feuille

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Comme  pour le marronnier  cette zone est marquée  par une altération des vaisseaux et l’absence de suber   (du moins  au moment de la chute de la feuille).

 

--Soit à l’ union de la tige et du pétiole :


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Cette  abscission  est  marquée  par  la formation   d’une volumineuse  zone de suber  avant même  la chute de la feuille ( A ) .

 

 

 

Explication  du phénomène.

 

 

L’abscission   est un phénomène  complexe  où  vont intervenir :

 

--Le soleil qui agit sur les cytochromes de la feuille  ( chromoproteine  qui presente deux positions  ( isomére ) dont l’ un  est actif biologiquement   et l’ autre non . d’où modification ionique  surtout Ca    et par conséquent  électrochimique  sur les membranes cellulaires   )  nb. : La lumière  rouge  favorise  la forme  inactive, la lumière blanche  la forme active.

 

--Les phyto hormones –Auxine – Cytokinine – Acide Abscissique –

--Un  gaz ; l’éthylène. ( produit à partir de la méthionine  qui est un acide aminé – essentiel pour l’homme )

--Les  enzymes : cellulase – pectinase .

--Les gènes.

 

La chute de l’ensoleillement   est le facteur principal  mais pas le seul ; la sécheresse  peut aussi  mettre en route le processus de la chute des  feuilles.

 

Le processus  est d’ abord  purement chimique.

Les  feuilles  vont commencer à se vider  de leurs   nutriments .Ces nutriments   vont être mis en réserve  dans le tronc  de la plante.

 

2 phyto hormones  vont  voir leur production  diminuer dans la  feuille

L’auxine  ou acide beta indolacetique ( AIA) dont le rôle est de stimuler la croissance et de maintenir la tige  intacte .

Les  cytokinines  la principale est  la Kinetine  (  ( 6 furfur aminopurine )  qui ont pour  rôle  la stimulation de la croissance cellulaire , le ralentissement  du vieillissement   ( la senescence ) .

 

Avec les  jours courts    la feuille se met à  synthétiser de  l’acide abscissique   ( Sesquiterpene C15 ) ( autrefois appelé Dormine )   Cette  substance  qui  sur les  graines  inhibe la germination  - va stimuler le  processus d’ abscission pour les feuilles et pour les fruits  par  deux mécanismes :

--la synthèse d’éthylène  ( qui normalement  est bloquée  par l’ auxine  )

--la production  d’un  ensemble d’enzymes   les cellulases  ,les  pectinases ou des polygalacturonases ( qui  vont  hydrolyser les constituants  de la membrane cellulaire.).

 

L’éthylène  ( H²C=CH² ) gazeux  qui  stimule  la maturation  des  fruits  ( utilisation industrielle )  va aussi   stimuler l’ abscission   et la senescence de la feuille

L’éthylène va  en effet  agir sur le  niveau de la répression et de la  dérépression de certains gènes, donc sur  celui de la synthèse de certaines enzymes.

L’éthylène  va   aussi   favoriser   la diminution  de la production  d’auxine  par les feuilles.

Pour la petite histoire en 1901 : on remarqua que les feuilles des plantes situées à proximité des lampadaires (à bec de gaz) tombaient prématurément.

 

 

Les points  positifs de la chute des feuilles :

L’intérêt  pour l’arbre  est multiple

-- intérêt pour l’ élimination  de déchets : la feuille  est la zone d’ évaporation ; la sève brute  apporte    un grand  nombre  d’ ions mais  tous ne vont pas  être utilisés   en particulier l’ ion Calcium  - on constate   d’ ailleurs une charge très importante dans la partie terminale des  tiges  dans les  pétioles  et dans les feuilles  en cristaux d’ oxalate de calcium .

-- on  a vu que les nutriments   et les produits de dégradation des feuilles sont  mis en stock  dans les cellules de réserve du tronc  .qui seront réutilisés  pour les nouvelles feuilles du printemps.

-- Comme la sécheresse, le gel provoque des phénomènes d’embolie, car les gaz dissous dans la sève sont peu solubles dans la glace et forment des bulles d’air. C’est l’embolie hivernale. En tombant  avant les  gelées  les feuilles évitent cette destruction  et prennent  ainsi  le temps  de rapatrier leurs nutriments  dans les  troncs ..

 

Ref

-- Traité  fondamentale de Botanique  Ulrich Lüttge et col    Edition TEC er DOC   2002. P 503  526

--  Biologie  et physiologie végétale  S Meyer et col    Edition Maloine .P 372 -373

-  -Botanique général  Wilhelm Nultsch  edition  De Boeck    1998. P 466 – 560 .

 

 

    Dominique.

 

Modifié par Dominique.
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Un article passionnant, et une chose que je découvre: les nutriments des feuilles sont "rapatriés" dans le tronc avant la chute de celles-ci.

Peut-on assimiler ces nutriments à de la sève élaborée, et cette migration se fait-elle par les mêmes canaux (vaisseaux du phloème)?

Merci pour ce formidable partage de connaissances Dominique.

Jpl80

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Toujours étonnant ce que présente Dominique, préparant secrètement ses sujets, il nous les offre ensuite avec élégance et belle documentation

Je me demandais à quel point cet événement qui a lieu au niveau de l'attachement des feuilles à l'arbre et à leur détachement se traduit au niveau des racines

par des comportements parallèles et si on pouvait imaginer les illustrer. Que se passe-t-il au niveau des radicelles et de la relation avec les mycorhizes

lorsque les feuilles de l'arbre ne fonctionnent plus en tant que machines à photosynthèse ?

 

cordialement, merci pour l'instruction

SDS

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  • Admin

Bonjour,

 

Encore une excellente étude !

 

Pour ma part, je fais souvent des "études" uniquement en pensée.

Je retiens des phénomènes curieux et parfois, d'autres phénomènes curieux se rattachent aux premiers et des debuts d'explications s'installent, contredites ou confirmées parfois par les suivantes.

 

J'avais remarqué que certaines branches de mes chênes, restaient vertes, alors que toutes les autres feuilles commençaient à jaunir et à tomber.

Mon idée était que la chute des feuilles  était génétiquement programmée et que l'arbre ne pouvait pas exercer cette programmation sur des branches qui ne pouvaient pas recevoir la sève contenant des "signaux" pour cette chute.

J'avais d'ailleurs écrit ceci en 2015 :

 

 

Il y a quelques années j'avais fait une observation inattendue .

Au printemps, de nouvelles feuilles apparaissent sur les branches de mes chênes, qui sont dépouillées depuis l'automne du vieux feuillage.

Or  certaines  rares branches,   portent des feuilles séchées  de l'an passé, toujours en place.

De plus les couleurs sont plus "fraîches" que celle des feuilles tombées au sol !

Donc la question : pourquoi certaines feuilles sont tombées (peut-être 99,9%)  et que certaines autres sont restées intactes, sèches mais toujours en place ?

Toutes les feuilles devraient rester intactes ou être tombées.

L'explication ne demande pas beaucoup de réflexion.

Normalement les feuilles de ces chènes, leur rôle terminé, sont programmées pour tomber.

Les feuilles restées sur la branche sont des feuilles qui n'ont plus été alimentées par l'arbre, la branche est cassée ou les canaux conducteurs de sève bouchés par des champignons.

Ces feuilles sont mortes jeunes, accidentellement  et n'ont pas l'occasion de séparer activement de l'arbre.

L'arbre a appris, au cours des millénaires à se débarrasser de toutes  ses  feuilles devenues inutiles et même encombrantes, avant que les vents d'hiver et les intempéries (neige, givre) ne risquent de casser les branches....

 

 

Dans l'idée de la programmation, une nouvelle information  est venue s'ajouter à mes réflexions sur la chute des feuilles d'arbres.

Il existe un bambou,  (Phyllostachys bambusoides) qui ne fleurit que tous les  120 ans, mais surtout au même moment partout dans le monde.

(pas par télépathie !)

 

Je suppose que tous ces bambous sont issus d'une même souche chinoise  et qu'à partir de là, c'est la même horloge génétiquement programmée qui le fait fleurir quelle que soit l'endroit où il a été implanté dans le monde..

 

De la même manière, le "cactus de Noël" (Schlumbergera x buckleyi) fleurit au début de l' hivers sous nos climats, car il est originaire du Brésil, décalage horaire oblige.

http://forum.MikrOscOpia.com/topic/3473-schlumbergera-x-buckleyi/?hl=schlumbergera

 

Un peu comme la migration des oiseaux, le comportement des plantes, prend son origine dans les temps "géologiques".

Il doit falloir une sélection naturelle + une programmation génétique acquise pour en arriver à ce résultat.

On suppose que les grandes migrations (oiseaux mais aussi mammifères africains) ont une origine dans des modifications climatiques régulières et de grande amplitude.

De même les arbres perdraient leurs feuilles en prévision des grands vents d'hivers afin de ne pas casser sous les raffles...

 

Amicalement.

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